On ne « parle pas avec des phrases ». Pour s’en convaincre, il suffit d’enregistrer une conversation ordinaire, une émission de TV ou de radio et de retranscrire les propos. Généralement l’oral entendu ne semble pas particulièrement relâché mais il sera souvent difficile de déterminer là où commencent et là ou finissent les phrases. En conclusion, on utilisera la notion de phrase pour décrire les énoncés écrits. Pour ce qui concerne l’oral ordinaire il vaut mieux utiliser le terme plus large d’énoncé. Pour analyser l’oral les linguistes utilisent d’autres notions comme période qui sont définies sur des critères intonatifs Ainsi, une période se termine par une intonation descendante.

Conclusion pédagogique :

la phrase est une unité « pratique » pour aborder les écrits. C’est une unité de taille « moyenne » : entre le paragraphe et le mot, ainsi cela en fait une unité pertinente pour étudier la langue écrite en classe. (Voir aussi : ORAL/ECRIT) mais il faut que l’enseinant ait conscience des limites de ce concept et que cette notion soit construite peu à peu au cours des cycles 2 et 3 sans que chaque nouvelle "définition" viennent pour autant contredire la précédente. C’est ce que je vais développer dans les dux parties ci-dessous.

Qu’est-ce qu’une phrase ?

Les réponses à cette question sont nombreuses, et on peut s’appuyer sur différents critères pour définir cette notion. Une difficulté majeure, aucune ne permet de définir de manière absolue cette notion. Il serait donc vain de chercher « la » définition, et il faut donc se résoudre à en adopter plusieurs en fonction de l’objectif poursuivi. Nous allons explorer quelques unes des définitions les plus classiques et voir les avantages, mais aussi les limites, de chacune. Nous les proposons ensuite, dans un ordre de progression pédagogique.

1. une suite de mots qui commence par une majuscule et qui se termine par un point ;
2. un énoncé qui contient au moins un verbe conjugué ;
3. un énoncé constitué d’un groupe nominal sujet et un groupe verbal
4. un groupe de mots formant un sens complet.

• les textes poétiques ne présentent pas forcément la même organisation (majuscule en début de ver, parfois absence de ponctuation …)
• on trouve des majuscules dans le discours rapporté
• les noms propres ont des majuscules

• il existe des phrases sans verbe : les phrases nominales
• le verbe existe sous des formes non conjuguées à l’infinitif et au participe
• des phrases comme « Il va aller … », « Il doit faire … » l’identification d’un seul verbe est problématique

• elle présuppose un ordre GNs + GV …
  mais ce qui n’est pas le cas d’un grand nombre de phrases dites « réalisées » … les types de phrases : interrogatives, emphatiques, impératives, exclamatives … en outre la forme de la phrase peut également entraîner des perturbations : négation, passivation, tournure impersonnelle …

• il y a des énoncés qui n’ont pas de sens mais qui sont de phrases au sens des trois premières définitions : Il l’emparouille et l’endosque contre terre. (H. Michaux, Le grand combat).
• inversement, il y a des énoncés qui ne satisfont pas aux définitions ci-dessus et qui ont pourtant un sens, comme ce panneau :
  
  
• ou encore l’énoncé de ce télégramme « colis bien arrivé »

Par conséquent, il est très difficile de s’appuyer sur le sens pour étudier la langue (cf. SENS et GRAMMAIRE), surtout quand comme ici, on précise « sens complet ». Une question est justement une phrase qui demande à ce que son sens soit complété.

Comme pour beaucoup de notions, le concept de phrase va donc se construire peu à peu au cours du cursus scolaire. On procèdera en partant des critères les plus simples et des formes canoniques pour aborder par la suite les tournures plus complexes.