Langue

mercredi 28 novembre 2007
par  Jean-Pascal SIMON

 

Une langue est un système de signe qui permet la communication entre des sujets. Elle sont des créations sociales, c’est à dire qu’elles résultent d’une forme de contrat entre un ensemble de locuteurs qui s’accordent sur un idiome et une norme du « bien parler ». Cette question : définir ce qu’est « bien parler » et qui « parle bien » est une chose difficile et cela donné lieu (et donne encore lieu) à des positions souvent plus idéologiques que linguistiques. L’histoire de la langue française est remplie de ces oppositions. Aujourd’hui, c’est bien souvent le dictionnaire qui départage les personnes qui s’affrontent sur ce point et, ainsi, on estime que « si un mot est dans le dictionnaire c’est qu’il est français ». La réalité n’est pas si simple car il se crée des mots nouveaux chaque jour qui n’entrent pas tout de suite dans les dictionnaires, et les dictionnaires conservent des mots qui ne sont plus guère en usage de nos jours, par exemple : le mot araire est encore dans le dictionnaire alors que depuis bien longtemps on ne laboure plus qu’avec des tracteurs …

La mission de l’enseignant est de transmettre la norme, il importe donc d’enseigner les usages de la langue qui sont valorisés et valorisants, il en va de l’avenir social et professionnel de nos élèves. C’est pourquoi avant de mettre en avant la variation de la langue (ce que l’on pourra aborder très ponctuellement et dans une dimension historique en fin de cycle 3) il faut insister sur ce qui fait système.

Parfois, les usages ordinaires des élèves se distinguent des usages normés, face à cela, il importe de ne pas stigmatiser les élèves comme autrefois, quand on punissait l’élève qui parlait patois à l’école ce qui pouvait conduire certains enfants à ne pas oser prendre la parole. Face à la variation on peut considérer deux situations :

- l’élève produit un énoncé qui enfreint une règle : il *partaquatre z’animeaux il convient dans ce cas de retravailler la règle 

- il peut aussi utiliser un mot « particulier » régional, ou appartenant à du français « hors de France ». Ce sera le plus souvent un élément lexical qui sera concerné comme en français régional : bugne, bourriche ... et en français « hors de France » : taxieur qui désigne en Afrique du nord la personne qui exerce la profession de chauffeur de taxi). Il serait faux de dire que ces mots n’appartiennent pas à la langue française. A partir de ces utilisations, on peut engager un travail de réflexion sur les usages locaux du français et ce qu’ils apportent à la langue « standard[1] », avec des mots comme aïoli, bouillabaisse, tapenade, couscous, pizza, kebab … nous sont venues des recettes nouvelles.

L’enseignant doit avoir conscience que les langues sont des systèmes vivants et de ce fait elles naissent, vivent et parfois meurent. D’où plusieurs conséquences :

a) Les langues évoluent : entre une langue « jeune » et une langue « adulte » il y a autant de différence de physionomie qu’entre une personne enfant et adulte. Pour s’en convaincre il suffit de comparer les premiers écrits en langue française[2] comme le serment de Strasbourg (880) et une page de journal actuel.

b) Les langues « débordent » : si on peut décrire une partie des faits de langue par des règles, bien souvent ce sont les exceptions qui sont la règle. La règle en linguistique est un énoncé qui ne rend jamais compte à 100% d’un fait. Une règle « marche » à 80%, parfois plus … parfois moins …

Bibliographie :

Braudeau Michel, Encrevé Pierre (2007), Conversations sur la langue française, Paris : Gallimard, Collection blanche.

Walter, Henriette, (1997), L’aventure des mots français venus d’ailleurs, Paris : Robert Laffont.



[1] Pour les élèves on n’emploiera pas ce mot bien sûr, on parlera, par exemple, de « français ordinaire ».

[2] Ou du moins ce qui sont étiquetés comme tels