Parties du discours, classes de mots, nature ...

lundi 20 octobre 2008
par  Jean-Pascal SIMON

Le terme « parties du discours » est un quasi-synonyme de nature ou classe grammaticale. On peut donc se demander mais alors pourquoi cette « nouvelle » terminologie alors que l’ancienne « allait si bien ? ». Allons au-delà de cette objection :

 

Tout d’abord, en distinguant la terminologie pour l’enseignant et celle qui est destinée aux élèves : avec les élèves on peut continuer à utiliser le terme « nature » en face de « fonction » ; l’enseignant doit avoir éprouvé les limites de cette conceptualisation qui établit, une fois pour toutes, des listes de nature et qui attribue à chaque mot une nature. En outre, il est intéressant de noter que les programmes de 2007 utilisent un terme proche : « classe de mots » (p.115).

Ce qui est intéressant avec l’approche en « parties du discours » ou (dans une terminologie linguistique transposée) en « classes de mots » c’est justement l’idée de classement, de catégorisation qui sous-tend cette appellation et qui permet d’échapper à un étiquetage du type mot = nature. En effet, la liste des natures possibles n’est établie de manière définitive et absolue et les mots n’ont pas de nature a priori, c’est le contexte qui permet de la définir. Nous allons maintenant développer ces deux points.

Quelle classification ?

L’histoire de la grammaire nous apprend que c’est depuis l’Antiquité que l’on cherche à classer les mots. C’est entre le IIIe siècle av. J.-C. - IIe siècle ap. J.-C., que va s’élaborer une classification qui est à l’origine des « natures » que l’on trouve dans la grammaire scolaire. La classification la plus connue est celle de Denys le Thrace, (fin du IIe siècle av. J.-C.) qui distingue 8 catégories : nom, verbe, participe, article, pronom, préposition, adverbe et conjonction. La grammaire latine va reprendre 7 de ces 8 classes et ajouter l’interjection.

Une absence remarquable dans ces deux classifications : celle de l’adjectif qui est alors considéré comme une sous partie de la classe des noms. D’ailleurs dans le Littré on trouve sous l’entrée « nom », nom-substantif et nom-adjectif, montrant en cela que cette opposition qui nous semble « évidente » n’est que très récente.

La grammaire traditionnelle scolaire, qui s’est fixée au cours du XIXème siècle a retenu 9 parties du discours : le nom / l’article / l’adjectif / le pronom / le verbe / l’adverbe / la préposition / la conjonction / l’interjection. Ce découpage, hérité de la tradition gréco-latine n’est pas sans poser de problèmes et a de ce fait évolué. On a, par exemple, préféré mettre en avant la notion de DÉTERMINANT plutôt qu’article. A partir des programmes de 2007, on retiendra les catégories principales suivantes :

· Nom

· Adjectif qualificatif

· Déterminant

· Pronom

· Préposition

· Conjonction

qui pourront être analysées plus finement (Voir DETERMINANTS). Auxquelles on ajoutera la catégorie « présentatif » afin de pouvoir classer les phrases idiomatiques en français comme : Voici … ; Voilà …. Et Il y a …  sans entrer dans des considérations complexes qui, par exemple, prendraient en compte un état ancien de la langue.

Comment classer les mots ?

C’est moins la classification adoptée que le travail même de classification qui est intéressant sur le plan pédagogique. Le travail de l’enseignant sera donc d’amener les élèves à construire les catégories proposées ci-dessus. Pour cela on peut s’appuyer sur des critères :

· Morphologiques

· Syntaxiques

· Sémantique

Les critères morphologiques vont prendre en compte les marques que peuvent prendre, ou non, les éléments d’une catégorie. Ainsi les verbes sont porteurs des marques de personne, le temps, le nombre, les noms ont un genre fixe et portent une marque de nombre, les adverbes sont invariables …

Les critères syntaxiques, au sens large, prendront en compte la place du mon dans l’énoncé ainsi que son entourage. Ainsi, l’adjectif qualificatif est toujours dans la dépendance d’un nom, le déterminant est toujours, en français, à gauche d’un nom, comme la préposition est à gauche d’un groupe nominal.

Les critères sémantiques ont été très utilisés en grammaire traditionnelle, où on a défini les classes de mots en fonction de leur référent par exemple :

· le nom : désigne des êtres vivants, des choses, des qualités, ...

· l’adjectif qualificatif : expriment la manière d’être d’une personne ou d’une chose ;

· le verbe : exprime une action faite ou supportée par le sujet ;

· 

Cette manière d’établir les classes de mots est assez problématique en français car on trouve de nombreux exemples de catégorie notionnelle qui peuvent être exprimée par plusieurs catégories grammaticales. En effet, une action peut être exprimée par un verbe, mais la plupart des verbes peuvent être dérivés en nom : courir à course, détruire à destructionidem pour les qualités : gentil à gentillesse

Le bon usage à faire de ce critère est d’utiliser ce type de critère « en bout de course », c’est-à-dire dans le cadre d’un affinement extrême des catégories et conjointement avec les autres critères. Ainsi, certains adjectifs peuvent être accompagnés par l’adverbe « très » et d’autres pas selon que l’adjectif exprime une qualité ou catégorise le nom auquel il se rapporte : « une fête très importante » mais on ne peut pas dire : « une fête très nationale ». « Qualité » et « quantité » sont des critères de classement sémantiques mais ils sont mis en évidence par des propriétés syntaxiques.

Ce qu’il faut retenir :

· Il n’existe pas de classe de mots de manière absolue, mais des classements possibles ;

· On utilise donc en classe, une classification provisoire correspondant au niveau de catégorisation atteint par les élèves ;

· Le travail de catégorisation s’appuie sur un faisceau d’indices, sur plusieurs critères de reconnaissance.


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